janeiro 20, 2010

Francis Fukuyama: ‘Obama enganou-se sobre o significado da sua eleição‘ in Le Figaro

LE FIGARO. - Quel bilan faites-vous de la première année de la présidence Obama ?

Francis FUKUYAMA. - Obama s'est sans doute trompé sur la signification de son élection. La grande majorité qu'il a rassemblée en 2008 voulait moins faire bouger les lignes de la politique américaine vers la gauche, comme cela avait été le cas sous Roosevelt, qu'exprimer un vote de protestation à l'encontre de George W. Bush. De nombreux électeurs indépendants, centristes, qui votaient habituellement républicain lui ont donné leur vote. Or, Obama a lancé immédiatement d'ambitieuses réformes sociales. Le plan de relance, le sauvetage de l'industrie automobile, puis le chantier de la santé ont poussé bien des gens à conclure qu'il ne pratiquait pas la politique «au-delà des partis» qu'il avait promise. C'est la raison pour laquelle il rencontre si rapidement tant de résistance.

Les analystes ont pourtant beaucoup souligné pendant la campagne ce désir de changement qui traversait la société américaine : or, vous dites que cette société n'est pas prête pour de grands chamboulements ?

Oui, c'est ce que je pense. Le vote de la jeunesse n'a pas été aussi large qu'on l'a dit. Une grande partie des électeurs d'Obama est en réalité venue du centre. Mais peut-être cette erreur d'analyse du président va-t-elle finalement permettre à notre pays d'opérer une transformation majeure. Si le président arrache la réforme de la santé au Congrès, il aura accompli une tâche majeure. Les gens réaliseront qu'elle apporte de vrais bénéfices et que leurs peurs sont infondées.

Les grandes réformes ne vont-elles pas souvent à contre-courant ?

C'est vrai. Mais on a tort de comparer le contexte dans lequel se situe Obama à celui de 1932. Roosevelt avait un vrai mandat pour un changement profond. Même chose pour Reagan, ce qui n'est pas le cas pour Obama.

N'y a-t-il aucune chance que la réforme Climat sur la réduction des émissions de CO2 passe cette année ?

Aucune, selon moi, avec ce Congrès. Même chose pour la réforme de l'immigration, qui est faisable, mais n'est pas possible actuellement. Arracher la réforme de la santé serait déjà un accomplissement formidable. Depuis cinquante ans, tous les présidents ont tenté de s'atteler à cette tâche.

Certains disent qu'Obama n'a pas le talent de Lyndon Johnson pour amadouer le Congrès…

Peut-être, mais il faut comprendre que le Congrès a beaucoup changé et que la vie politique est beaucoup plus polarisée aujourd'hui. Cette polarisation vient du fait que les différents électorats se nourrissent des chaînes d'information correspondant à leurs choix idéologiques. Elle s'explique aussi par la disparition des hommes de l'ère Reagan qui étaient des républicains centristes, moins extrémistes qu'aujourd'hui.

Qu'a accompli le président en politique étrangère ?

Il a fait ce qui était le plus facile à faire : changer le ton de la diplomatie américaine, montrer qu'elle ne compte pas sur la seule force militaire. Il a fait des ouvertures vers l'Iran et la Corée du Nord, dont il était prévisible qu'elles n'auraient pas grand succès. Mais cela va lui permettre de revenir à une politique plus dure. On ne peut pas parler pour l'instant de succès ou d'échecs. La politique afghane aurait pu être plus prudente mais elle n'est pas non plus déraisonnable. Personnellement, je ne suis pas pour un retrait d'Afghanistan mais je ne suis pas certain qu'il soit pertinent d'ajouter un grand nombre de troupes. Dans les années 1980, le fait que les démocrates aient réduit les effectifs de l'armée a poussé les militaires à être plus performants dans la formation de cadres locaux. Le risque de l'envoi de troupes supplémentaires est que les militaires américains ne ressentent pas clairement l'urgence sur place : nous avons dix-huit mois pour commencer à passer la main. S'il s'avère que c'est un échec, il faudra partir.

L'Afghanistan peut-il être le piège qui fasse échouer cette présidence ?

Pas à court terme. Le risque d'échec est grand sur l'Iran ou le Pakistan. Le risque d'une guerre dans le golfe Persique est une vraie possibilité, car il est probable que les Iraniens passeront ce que les Israéliens considèrent comme une ligne rouge. Une action militaire israélienne est une vraie option.

Les Américains n'ont-ils pas les moyens de dissuader Israël de frapper l'Iran ?

L'Administration Obama n'a certainement aucun intérêt à ce qu'une guerre avec l'Iran éclate, mais je ne pense pas qu'elle ait la capacité ni la volonté politique de stopper Israël. Cette Administration en est réduite à limiter les dégâts. Or, le dossier nord-coréen montre les limites des initiatives diplomatiques. Si l'Iran décide de poursuivre son programme nucléaire, nous aurons bien du mal à en gérer les conséquences militaires.

Cette impuissance ne révèle-t-elle pas le déclin de l'ordre américain et plus généralement occidental ?

Si la crise dégénère, c'est effectivement ce que cela démontrera. Mais si Obama n'est pas rattrapé par l'Iran ou le Pakistan, et passe sa réforme de la santé, il pourrait bien devenir un très grand président.

http://www.lefigaro.fr/international/2010/01/20/01003-20100120ARTFIG00069-obama-s-est-trompe-sur-la-signification-de-son-election-.php

1 comentário:

  1. Mais comment a-t'il pu déclarer …


    Depuis des décennies, l'usage de la puissance des USA n'est pas pour soumettre les autres …

    C'est le sens des propos tenus le 15 janvier par Barack Obama au magazine Newsweek, article repris dans Le Monde, au-sujet de l'intervention en Haïti.

    Cf détails sur Pnyx: http://www.pnyx.com/fr_fr/poll/502

    C'est pas un peu too much, Mr Obama ? … faire comme s'il n'y avait jamais eu l'épisode irakien … Finalement, ce qui transparait clairement dans une sorte de volontarisme "nationaliste", c'est que sur la thématique du leadership des USA, Barack Obama saisit ce drame pour marquer l'autorité de sa présidence, qu'il a décidé de tourner la page de la repentance, certainement dans un objectif d'unification du peuple états-unien, mais sans doute aussi, à l'attention de l'ensemble de la planète: We are the Boss and, Yes, we can !

    Pour ceux qui doutaient encore que ce président serait celui de la reconstruction de la puissance …

    Cette réflexion n'enlève rien, bien-sûr, au fait que, dans sa dimension humanitaire, et pour le bénéfice du peuple haïtien qui en tant et si urgemment besoin, la vigueur de cet engagement est absolument formidable !

    ResponderEliminar